RMC (Rocky Mountain Construction), 3 lettres qui résonnent aux oreilles de tout coasterfan comme l’assurance de passer, a minima, un bon (voire excellent) ride, où l’annonce d’un nouveau RMC comme nouveauté est (toujours) une bonne nouvelle.
Pourtant inconnu au bataillon il y a un peu plus de 10 ans, le constructeur a su rapidement s’imposer comme le constructeur d’un genre extrêmement peu répandu : l’hybride coaster. Un mélange de bois (pour la structure) et d’acier (pour les rails), entre l’esthétisme d’un wooden et l’expérience d’un steel. Retraçons l’ascension d’RMC !
Histoire et origines
RMC célèbre ses 20 ans cette année. C’est en 2001 que naît la firme en Idaho aux Etats-Unis. A la tête de l’entreprise, Fred Grubb et 10 employés. Ayant d’abord vocation à faire de la rénovation traditionnelle sur des montagnes russes en bois, l’entrepreneur a eu le besoin d’évoluer. RMC a su construire des parcs aquatiques, des pistes de karting mais a aussi participé la construction de montagnes russes, comme Timberhawk: Ride of Prey à Wild Waves Theme Park ou encore plus connu, El Toro à Six Flags Great Adventure.
En 2007, LA rencontre de Fred avec l’homme que l’on connait tous, Alan Schilke, va faire basculer la feuille de route d’RMC. Alan Schilke est alors ingénieur consultant à Ride Centerline LLC. Les deux hommes vont réunir leur cerveau et ainsi sortir en 2008 l’Ibox Track. Cette innovation ouvre une nouvelle vie pour RMC : rénover et retracker des woodens devenus douloureux ou désuets en des montagnes russes d’un autre genre : hybride. Créer de toute pièce des montagnes russes est aussi dans leurs objectifs !
L’usine de la firme est située non loin de Silverwood ; parc qui a servi de zone tests avec ses deux woodens : Tremors et Timber Terror.
Un homme clé – Alan Schilke
Alan Schilke, ingénieur consultant chez Ride Centerline LLC est l’homme de la situation.
Il fait ses premiers pas dans l’industrie des montagnes russes chez Arrow Dynamics dans les années 1990. Il est à la tête du concept du 4th dimension, dont le prototype, X (désormais X² depuis 2008) ouvre en 2001 à Six Flags Magic Mountain.
Prototype impressionnant et d’un nouveau type, Alan fut critiqué par ses collègues. Quelques mois après l’ouverture d’X, Arrow fait faillite et se fait racheter par S&S Worldride. Alan continue, jusqu’en 2006, de travailler pour eux avant de fonder, avec Ned Hansen, Ride Centerline LLC, une firme d’ingénierie indépendante.
Alan travaille toujours sur des projets d’S&S mais est très vite contacté par RMC. C’est en 2008 que naît l’Ibox Track, mais aussi le Topper Track. Depuis, Alan ne cesse de travailler avec RMC.
Au fil des retracks et des créations, l’inventivité d’Alan ne cesse de surprendre et met la mécanique à l’épreuve des courbes : toujours plus rapide, plus de rotations et de virages secs (pour notre plus grand plaisir) !
Des retracks et des créations
La première montagne russe à bénéficier de l’innovation de l’Ibox Track est Texas Giant, à Six Flags Over Texas. Ce wooden, ouvert en 1990 a été designé par PTC (Philadelphia Toboggan Coaster Inc).
Les travaux de rénovation, initié en 2010, ont duré un an. Le parc en a profité pour changer son nom : New Texas Giant. En 2011, c’est donc la première montagne russe entièrement retrackée made by RMC qui ouvre ses portes au public.
La firme a redessiné une partie du layout afin de donner plus de pep’s sans pour autant dénaturer l’original. Cela se voit : la first drop est pus raide, les virages sont plus prononcés et la vitesse est constante tout du long ; cependant, le layout reste globalement inchangé.
2 ans plus tard, ce sont deux projets, totalement différents, qui prennent vie : le retrack de Rattler et la création 100% RMC : Outlaw Run.
Rattler est un wooden situé à Six Flags Fiesta Texas et construit par RCCA (Roller Coaster Corporation of America) en 1992. Son parcours a la particularité de jouer avec le terrain (le parc étant partiellement entouré par un mur de carrière) mais aussi de posséder un passage assez mouvementé dû au travail de la structure.
RMC a appliqué la même recette que pour Texas Giant : des descendes plus raides, des virages prononcés mais la nouveauté ici est l’ajout d’une inversion. Le parcours s’en retrouve aussi raccourci de plus de 500 mètres !
Outlaw Run, situé à Silver Dollar City est la première montagne russe 100 % RMC. La voie utilisée est le Topper Track, une voie spécifique pour les wooden. Le seul wooden qui possédait jusque-là une inversion était Son of Beast (ouvert en 2000 et détruit fin 2009), qui possédait alors un loop (retiré en 2006). Outlaw Run en contient 3.
La renommée d’RMC est lancée. Beaucoup de woodens des parcs du groupe Six Flags font peau neuve.
Et en Europe ?
Il faut attendre 2016 pour voir RMC débarquer sur le continent. Quel est donc le chanceux qui s’offre « the First European RMC roller coaster » ? C’est un zoo en Suède, Kolmården, situé non loin de Norrköping. Oui, un zoo. Qui en a déjà entendu parler avant l’annonce de Wildfire ? Personne ? A la tête du parc : Scandinavia Parks & Resorts, dirigé par Johan Tidstrand & Mattias Banker, deux passionnés de montagnes russes ayant voulu le meilleur wooden coaster du monde. Voilà, tout simplement.
[Relisez ici, là et encore ici la série sur le dynamisme des parcs suédois, principalement rédigé par Mathis en 2017]
On retrouve ici le Topper Track comme pour Outlaw Run. Wildfire est majestueusement dressé sur son rocher.
Anecdote : certains rochers ont été utilisés comme fondations. Cela n’a pas coûté moins cher car il a fallu les tester un par un.
En 2019, Robin Hood à Walibi Holland fait peau neuve (devenant Untamed) et Zadra à Energylandia, 100% création, étoffe l’offre du continent.
[Retrouvez ici l’épisode « Dans les coulisses de… » sur Untamed].
Les différents types de rails
Précédemment vu, l’Ibox Track est LE modèle d’RMC, utilisé lors des rénovations (mais aussi pour certaines créations). Ce rail permet de diminuer les coûts de maintenance globaux (moins de fatigue sur la structure, un ride plus lisse et hausse de la durée de vie du coaster).
Pour des créations de wooden, RMC utilisait le Topper Track, se rapprochant visuellement, et techniquement parlant, d’une voie de wooden traditionnel. La durée de vie des rails est d’environ 20 ans. Ce rail permet de diminuer les coûts de maintenance et de mettre des inversions sur des wooden. RMC souhaite cependant « abandonner » le Topper Track pour ses créations (cf. Zadra utilise l’Ibox Track), ayant eu quelques déboires avec Lightning Rod et des vibrations apparentes sur Outlaw Run et Wildfire.
Le constructeur s’est aussi lancé dans la montagne russe 100% en acier avec le modèle Raptor, un unique rail large de moins de 40 cm ! Les trains sont conçus pour n’accueillir qu’une personne par rangée. Le parcours global de ces modèles est plus compact (et intense ! certains riders ont souffert de bleus aux épaules après quelques tours).
De gauche à droite : Topper Track / Ibox Track / Raptor Track
RMC a également développé le T-Rex, un rail plus large que le Raptor mais encore aucune montagne russe n’en est équipée pour le moment.
RMC a innové avec Alan, pour S&S, en proposant une version élargie des rails Ibox Track pour leur modèle 4D Free Spin Coaster. De même, les rails pour les Skywarp de Skyline Attractions ont été conçu par la firme.
Les inversions – redéfinition de l’espace
Oubliez le loop, le corscrew, le cobra-roll… Dites bonjour au Zero-G-Stall, Barrel Roll Down Drop, Over-banked turn, 270° Double Inverting Stall… Atchoum. Certes, certaines inversions existaient déjà et ont juste été renommées par RMC mais d’autres sont issues du génie d’Alan. Petit listing de quelques-unes d’entre elles :
Zero-G-Stall : c’est un camel back mais effectué la tête en bas. L’entrée et la sortie de cette inversion se font dans le sens opposé. C’est désorientant, et plus si vous vous amusez à ~ lever la tête ~.
Il existe un variant de cette inversion, le Top-Gun-Stall (uniquement sur Twisted Colossus, un « dueling » hybride), où la partie du second parcours passe au-dessus de la première, comme si les passagers pouvaient se checker les mains.
Barrel Roll Down Drop : généralement situé juste après le lift (ou un demi -tour), la drop se fait tout en inversion.
270° double inverting Stall : présent uniquement sur Untamed, c’est une inversion qui permet aussi d’effectuer un virage, à la sauce RMC.
Zero-G-roll (variant) : dans l’attente de recevoir un nom plus officiel (3 inversions d’RMC porte actuellement ce nom), celui décrit est celui de Zadra. C’est simple : une fois à l’intérieur de l’inversion, vous ne savez plus si vous avancez, si vous reculer, si vous avez la tête en haut ou en bas. La structure joue aussi sur cet effet. Un moment dans un espace parallèle durant quelques secondes.
Les trains : la (presque) liberté & mariage des formes
Au début des retracks, RMC n’utilisait pas ses trains. Gerstlauer était alors à la conception.
C’est avec Outlaw Run que RMC présente ses propres trains, qui ressemble fortement aux trains Gerstlauer : des laps bars et une ceinture supplémentaire. Laps bars, inversions… La liberté des mouvements ! Presque. C’était sans compter sur les protège-tibias qui gênent facilement les personnes mesurant 1m70 et plus (à la louche). Quoi qu’il en soit, ils se font oublier dès lors que le train démarre.
Il y a deux générations de train. La principale différence entre les deux générations sont les essieux : la première génération (Outlaw Run, Wildfire, Medusa…) ne comporte qu’une roue porteuse – latérale – upstop. Ils se comportent comme un train de wooden classique.
La deuxième génération (Steel Vengance, Untamed…) comporte deux roues porteuses – latérales – upstop.
La deuxième génération contient donc un essieu directeur (steering axle), qui permet d’épouser la voie. La fluidité s’en retrouve accrue et le rayon de courbure minimal en est réduit. Sans ces trains, peut-être que Steel Vengance ou autre RMC plus récents ne seraient pas sortis de terre !
Un mix original : Tremors
Tremors, comme vu plus haut, est l’un des deux woodens à avoir servi de test pour RMC. Comme tout wooden, à son ouverture, la voie était une voie classique. Quelques années après, RMC a retracké une partie du parcours avec le Topper Track. En 2021, la montagne russe se fait, en partie, de nouveau rénover avec cette fois-ci de l’Ibox Track.
La montagne russe possède donc 3 types de voies !
Un cas d’école : Lightning Rod
RMC a le droit, aussi, d’avoir des coups de mous, comme tout constructeurs et toutes montagnes russes. La montagne russe ayant fait le plus de « dégâts » à RMC est Lightning Rod, située à Dollywood l’unique launch-wooden, doté du système de rail Topper Track. La société Velocity Magnetics était en charge du système de launch.
Ouvert en 2016, la montagne russe a subi de nombreuses fermetures journalières et mensuelles intempestives. En cause : le launch n’était pas assez puissant pour résister une journée entière d’opération, des pièces déjà usées après seulement quelques jours de fonctionnement et, sur le plus long terme : le Topper Track ne supporte pas les forces exercées.
En 2017, soit à peine un an après l’ouverture, le changement de launch fut inévitable : le launch se trouve raccourci de quelques mètres, ce qui impacte la vitesse globale tout du long du parcours. En 2019, c’est le zero-car (l’avant du train) qui subit une modification afin d’alléger le poids global du train.
Rappel du zero-car originel :
Il a subi un bon coup de rabot…
… pour finir à poil.
Malgré tous ces changements, les rails ne supportent plus les forces. RMC est donc obligé, début 2021, de changer les rails d’une bonne partie du layout avec l’Ibox track. First world RMC being retracked by RMC.
Pour conclure
RMC a cassé les codes des montagnes russes. Coïncidence ou corrélation, le constructeur n’est-il pas, à son insu, précurseur d’un renouvellement global ? Les années 2010 ont été marquées par de nouveaux modèles, de nouvelles formes de montagnes russes de la part de constructeurs plus connus comme Vekoma (que l’on croyait hors-jeu avec ses modèles de séries plutôt douloureux) ou bien Mack Rides ou encore Intamin qui a innové dans ses trains (désormais à lap bar) et la forme de ses rails ?
Le constructeur arrive toujours à repousser ses limites… jusqu’à où ?
Un grand merci à Din4112 et KingRCT3 pour leur participation !
Røyk, mai 2021
__________
Sources photos : Røyk (Untamed) (photo de couverture) / Site internet de RMC (logo RMC) / People Pill (Alan Schilke) / Roller Coaster Data Base – Dave Collins (Texas Giant) / Trip Savvy – Arthur Levine (New Texas Giant) / Reddit (Iron Rattler) / Branson Tourism Center (Outlaw Run) / Røyk (Wildfire) / SwedishWood (plan de Wildfire) / Wikipedia – elisfkc (trio de rails) / CoasterForce (T-Rex track) / Røyk (Zadra) / The CoasterKing (Twisted Colossus) / Flex – Captain Coaster (Medusa Steel Coaster) / Vidéos Youtube converties en GIF – (Untamed et Zadra) / RideCenterLine (wagon et train) / SFNE.online (wagon Wicked Cyclone) / TPR (wagon Twisted Timbers) / CC – Captain Coaster (Tremors) / BenJ – Captain Coaster (zero-car de Lightning Rod) / ? via Forum Coasters World (trains de Lightning Rod) / Florian – Captain Coaster (Steel Vengeance).