L’IAAPA a fêté son centenaire en 2018. Abréviation d’International Association of Amusement Parks and Attractions, la plus grande association internationale consacrée à l’industrie des attractions compte plus de 6300 entreprises adhérentes. Voici l’histoire de l’IAAPA, de ses origines après-guerre à aujourd’hui.
Véritable institution dans l’univers des parcs de loisirs, l’organisation poursuit en temps de crise comme en périodes fastes ses missions auprès de ses membres. Ces engagements sont vastes : défendre les intérêts communs au secteur, développer les liens commerciaux, ou encore favoriser les échanges sur les meilleures pratiques dans l’industrie. De sa naissance sur le sol américain, l’IAAPA s’étend de nos jours à travers plus de 100 pays.
1900-1917 : Premières réunions entre exploitants d’attractions
L’idée de rassembler les industriels des loisirs remonte au début des années 1900 aux États-Unis. L’association nationale des parcs de loisirs américaine (National Amusement Park Association) lance son premier meeting en septembre 1907. Le but : informer sur les méthodes de gestion échangées entre les adhérents. D’autres réunions suivent les mois d‘après. Elles étoffent le programme des conférences tenues : le business du camping, la gestion des foules ou encore le processus de recrutement des salariés.
Dépendante des sociétés de transports auxquelles son secteur économique reste étroitement lié, la NAPA se dissout l’année suivante. Néanmoins, la démarche de réunir les exploitants de parcs demeure présente.
Leap The Dips à Lakemont Park (Pennsylvanie), inaugurée en 1902 et plus ancienne montagne russe encore en fonctionnement
Luna Park à New York en 1907 atteste de l’effort croissant des parcs pour offrir une expérience immersive au public
Un secteur d’activité à part entière
Initialement des espaces de concerts et de danse, certains parcs deviennent dans les années 1910 des destinations où attractions en tout genre se regroupent. La technologie et les goûts du public évoluent également. Les parcs commencent alors à ressembler à ceux que l’on connait aujourd’hui : des lieux de divertissements et de rassemblement. Jadis une source de revenu secondaire, l’exploitation d’attractions devient un secteur lucratif à part entière. Par conséquent, les milieux d’affaires prennent conscience des enjeux communs au métier. Se rassembler pour mieux affronter ces défis semble alors devenir nécessaire.
L’hôtel du Congrès à Chicago, où se réunit la National Outdoor Showmen’s Association en 1917
En 1917, le collectif se formalise sous le nom de « National Outdoor Showmen’s Association » (NOSA). L’association protège les intérêts de tout ce qui est en rapport avec le spectacle : cirques, carnavals, fêtes foraines, parcs d’attraction… Mobilisés, leurs adhérents parviennent à faire annuler un projet de taxe ciblée dans l’État du Missouri. Ainsi, la NOSA démontre rapidement son efficacité.
Le 6 avril 1917, les États-Unis déclarent la guerre à l’Allemagne. De ce fait, l’économie américaine se restructure en profondeur pour s’adapter à l’effort militaire. Cela ne freine pas la lancée de la NOSA. Secrétaire de l’association, Franck Albert, affirme : « le divertissement soit un commerce essentiel, au même niveau que la nourriture et les vêtements ». L’organisation défend ses intérêts, notamment contre les restrictions dans la production de manèges.
1918 : Naissance officielle de la future IAAPA
La National Outdoor Showmen’s Association prend progressivement conscience des spécificités des parcs d’attractions établis dans un emplacement fixe – différents des manèges nomades. En conséquence, l’association créée en 1918 une branche dédiée aux besoins vitaux des parcs de loisirs. Cette nouvelle branche est reconnue comme la naissance de l’IAAPA actuelle.
Pour sa grande convention de 1920, la nouvelle organisation propose huit séminaires, dont un sur la publicité, les pique-niques, ou encore comment… réduire les frais d’assurance !
L’année suivante, les « Lois Bleues » de 1921 imposent aux parcs une fermeture obligatoire les dimanches. Les industriels du secteur s’organisent durant la convention cette année là pour opposer cette législation. Commence alors l’activité de lobbying de la future IAAPA. Dès lors, l’association ne cessera de travailler ses relations avec le législateur. Ce lobbying couvre autant les intérêts commerciaux que la sécurité des attractions.
En Août 1925, se met en place le National Kiddies Day. A l’unisson, les parcs à travers les États-Unis offrent des attractions et promotions spéciales destinés aux plus jeunes. Une démarche pour attirer le public familial encore largement présente dans l’association de nos jours.
1929 – 1945 : Solidarité en temps de crise, en temps de guerre
Après le krach boursier de 1929 s’amorce un déclin considérable dans l’industrie. On estime ainsi que plus de la moitié des parcs d’attractions américains ont fermé leurs portes au terme de la Grande Dépression en 1939.
De fait, le contexte économique morose conduit les associations du secteur à se consolider. En 1934, la National Association of Amusement Parks fusionne avec l’American Association of Pools and Beaches, son homologue dédiée aux destinations aquatiques. Le regroupement permet de maintenir le nombre d’adhérents à un niveau semblable.
Le banquet annuel de la future IAAPA en 1930 (Source : IAAPA)
Publication partagée à l’occasion du 25ème anniversaire de l’association
Alors que le monde s’achemine vers un second conflit mondial, le champ d’action de la future IAAPA s’élargit. Pour affronter les difficultés financières, l’association inaugure en 1936 un programme d’assurance responsabilité civile auprès de ses adhérents.
En 1943, la publication du premier « Guide and Manual » informe chaque adhérent des actualités de l’industrie. Ce nouveau service maintient le lien entre les parcs et les exploitants malgré la guerre. Alors Président de l’organisation, Leonard Schloss souligne cette solidarité croissante : « Les liens d’amitiés personnelles et de confiance réciproque se sont développés à travers l’association. »
« Les gens sont présents pour s’entraider »
Encore aujourd’hui, cet état d’esprit solidaire prédomine dans la culture de l’IAAPA. Vice-Président en charge de l’Europe, Afrique et du Moyen-Orient, Jakob Wahl, affirme en effet que « les gens sont présents pour s’entraider. Même s’il existe un concurrent à proximité qui cherche à attirer les mêmes visiteurs, on garde la porte ouverte pour accueillir son concurrent. » Une mentalité que M. Wahl explique par les intérêts communs à tout parc et tout constructeur d’attractions : « nous nous retrouvons tous en difficulté si l’un de nous échoue. »
L’édition 2019 du Safety Institute à Shanghai (Source : IAAPA)
Assurer la sécurité des attractions dans le monde entier
Cette solidarité se manifeste particulièrement pour ce qui concerne la sécurité des attractions. L’IAAPA s’efforce d’optimiser les normes de sécurité dans le secteur. Pour cela, plusieurs séminaires se tiennent chaque année pour former les intéressés à cet enjeu. « Nous possédons un sous-comité régional dédié à la sécurité. Il se réunit pour échanger sur les normes de sûreté, pour partager le savoir-faire et les meilleures pratiques avec tout le monde » précise M. Wahl.
Aussi, l’association réalise et partage des études détaillées sur la sécurité à bord des attractions. Depuis 2005, le Ride Safety Report recense chaque année tous les incidents qui se sont produits dans les parcs états-uniens ayant adhéré à l’IAAPA. Ces travaux approfondis visent aussi à « regarder les causes des accidents, et les enseignements qui en découlent », ajoute le Vice-Président de l’association.
En parallèle, l’IAAPA a établi en 1978 un processus pluriannuel pour déterminer les normes concernant la sécurité des attractions. Désormais cette action s’inscrit au sein de l’organisme ASTM International, qui définit des standards techniques dans de nombreux secteurs.
L’IAAPA publie l’an dernier un ensemble de recommandations pour la réouverture des parcs suite à la pandémie de la Covid-19
Les publications de l’IAAPA
« Nous avons produit des manuels, comme celui concernant le comportement des visiteurs. Actuellement nous en élaborons un autre concernant l’évacuation des attractions, nous en avons aussi rédigé un sur la mise en service d’une attraction » explique Jakob Wahl. Dans son manuel le plus récent de 2017, l’IAAPA recommande ainsi aux opérateurs de systématiquement tester une attraction pendant au moins un cycle avant de l’ouvrir au public. Le rapport conseille également des tests quotidiens plus approfondis, comme celui des systèmes de freinage d’urgence.
Des mannequins gorgés d’eau équipent un train de Steam Racers à Sunac Land Wuxi en phase de tests
L’IAAPA à la conquête du monde
De sa genèse centrée aux les États-Unis, l’IAAPA évolue pas à pas pour devenir un réseau mondial.
Comité d’accueil pour la tournée estivale de 1958 (Source : IAAPA)
Peu après sa naissance en 1923, l’organisation accueille son premier adhérent outre-Atlantique : l’emblématique parc du littoral anglais Blackpool Pleasure Beach. Puis, deux autres parcs urbains européens et tout aussi iconiques, Tivoli Gardens à Copenhague et Liseberg à Göteborg, élargissent encore les rangs de l’association après la Deuxième Guerre mondiale. Plus tard encore en 1959, le salon d’exposition annuel de la future IAAPA se renomme en « International Amusement Outdoor Show » pour refléter sa vocation internationale.
En 2019 à Paris, l’Euro Attractions Show est rebaptisée IAAPA Expo Europe pour coïncider avec la nouvelle charte graphique de l’IAAPA
Par ailleurs, au fil des décennies, l’organisation s’implante aussi sur les continents européen et asiatique. D’abord, l’IAAPA initie un contact avec les structures homologues à l’étranger. En 1961, un ancien président de l’association, Bob Plarr, se rend à Paris pour le Congrès des Forains, qui réunit alors de nombreux opérateurs d’attractions en Europe. Cette venue précède la participation de l’IAAPA à de nombreux événements internationaux : l’Exposition Internationale de 1982 en Allemagne puis la toute première Amusement Expo chinoise en 1986 parmi d’autres.
Ensuite, l’IAAPA se rapproche de ses partenaires internationaux, pour ensuite reprendre directement en main leurs activités. En 1997, elle gère entièrement le lancement de l’Asian Attractions Expo, le salon professionnel dédié aux régions Asie-Pacifique. À Bruxelles en 2001, l’association inaugure ses premiers bureaux hors du territoire américain. S’ensuit l’ouverture d’une antenne asiatique à Hong Kong en 2010.
L’association franchit enfin un record de fréquentation en 2019 : 42 600 professionnels (et curieux !) ont ainsi franchi les portes du Convention Center d’Orlando pour assister à l’IAAPA Expo.
Depuis 2020, le port du masque est devenu obligatoire dans de nombreux parcs comme à Plopsaland de Panne
L’IAAPA face au défi sanitaire
Dernièrement, la crise de la Covid-19 oblige l’association – comme le secteur tout entier – à se repenser. Dans ce contexte, l’IAAPA publie en 2020 un ensemble de protocoles destinés pour limiter au maximum la propagation du virus sur les sites d’attractions. En effet, la désinfection systématique, la gestion des foules ou encore le nombre plus restreint de visiteurs accueillies s’ajoutent aux recommandations déjà formulées par l’IAAPA depuis longtemps.
Mais selon Jacob Wahl, la pandémie agit aussi comme un « accélérateur » des changements déjà en cours. L’organisation multiplie ainsi les événements virtuels et renforce sa mission éducative. En somme, un nouveau tournant dans l’histoire de l’IAAPA que nous verrons en detail dans un second article.
Philippe-Minh Nguyen et Røyk
Août 2021